Vieux criminels de Nicolas de Crécy
Parfois la frontière entre littérature « blanche » et « noire » est mince.
La bande dessinée est un Art, tout autant que la littérature.
Nicolas de Crécy est un artiste visiblement accompli dans les deux disciplines et joue, avec Vieux criminels, les funambules sur le mince fil reliant les deux genres littéraires : la littérature dite générale et celle qui est encore peu perçue dans tous ses dégradés de Noir.
Ces deux qualités seraient suffisantes mais non, l’auteur ajoute comme pompon sur la Garonne (traduisez cerise sur le gâteau pour les nordistes) une bonne tranche d’humour.
Le thème qui sert de fondement ici est original et éveille immanquablement la curiosité.
Et si Bonnie and Clyde avaient orchestré leurs morts pour, en réalité, s’enfuir vers la France pour s’enterrer dans le fin fond des Cévennes pour y ouvrir un lavomatique « presque » innocent ?
Ça pourrait ressembler à Eva Parcoeur et Claude Barreau, ces deux seniors qui s’occupent de leur fils « trouvé » 7 ans plus tôt, bébé abandonné au pied d’un arbre.
Ils sont tous deux âgés, bougons, un vieux couple usé qui donne des « cours » de meurtres et autres activités dignes des gangsters de légende qu’ils ont été au neveu d’un caïd local ? Eva qui pleure sa beauté depuis longtemps passée et qui se dit qu’elle gâche peut-être ses dernières années avec Claude, cloué dans un fauteuil roulant. Claude qui se sent délaissé, inutile, et qui rêve de pouvoir remarcher pour, pourquoi pas, reconquérir son Eva.
L’histoire est parfois attendrissante, souvent très drôle. L’auteur arrive à apporter, si ce n’est de la crédibilité, en tout cas une autre fin à ce couple de légende. Il n’enlève rien à leur panache, bien au contraire. Il les rend sympathiques, humains. Il leur donne une âme qu’ils n’ont pas dans les vrais articles des années 30 où ils n’étaient qu’un couple d’assassins dont le monde entier a vu les photos de leur auto criblée de balles avec leurs corps encore à l’intérieur et les policiers souriant posant près du véhicule.
On se régale à lire ce roman et à découvrir ce que sont peut-être, qui sait, devenus ces deux Vieux criminels.
4ème de couverture :
« Extorquer des fonds, ouvrir des bouteilles avec les dents, faire l’amour dans un motel !…
Tu te souviens ? »
Ils ont connu la gloire sous le nom de Bonnie Parker et Clyde Barrow, quand ils semaient la mort le long des routes du Texas. À présent, ils sont Éva et Claude et vivent planqués de ce côté de l’Atlantique, dans cette France où Valéry Giscard d’Estaing sera bientôt président. Ils tiennent le lavomatique d’une localité perdue des Cévennes, dissimulant ainsi un commerce illicite de poudre blanche. Mais les clients sont rares, la boutique périclite et les truands doivent revenir à leur passion de jeunesse, le hold-up. La tentative est un naufrage. Après une fuite piteuse, Éva et Claude s’égarent dans un sous-bois où ils découvrent, effarés, l’être le plus vulnérable qu’il soit donné de rencontrer.
L’auteur :
Nicolas de Crécy étudie aux beaux-arts d'Angoulême avant de publier en 1991 son premier livre, Foligatto, avec Alexio Tjoyas, qui reçoit un accueil unanime. S'ensuivent plusieurs albums récompensés par des prix prestigieux (Prix du meilleur album Angoulême 1998 pour Léon la Came). Maître du dessin et de l'aquarelle, il distille le fantastique avec un talent inégalé, et fait naître des univers singuliers aux ambiances toujours prégnantes. Son travail est aussi marqué par des incursions dans le dessin animé, le carnet de voyage et la collaboration avec les grandes institutions. Traduite de par le monde, son œuvre fait l'objet d'expositions en Europe et au Japon. Il vit à Paris.
" Extorquer des fonds, ouvrir des bouteilles avec les dents, faire l'amour dans un motel !...Tu te souviens ? " Ils ont connu la gloire sous le nom de Bonnie Parker et Clyde Barrow, quand ils semaient la mort le long des routes du Texas.
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