Créatures de Crissy Van Meter
Traduit de l’anglais par Mathilde Bach.
Cette année 2021 signe l’année d’un renouveau chez Delcourt Littérature qui devient La Croisée avec un catalogue de littérature étrangère qui promet de belles découvertes.
On commence ce mois-ci avec un roman aussi beau dedans que dehors.
On pourrait donc croire, au vu de la couverture, que l’on va se retrouver face à des créatures des fonds marins. Non, mais pas loin.
Crissy Van Meter nous transporte sur une île au large de la Californie, Winter Island.
Si on est un tantinet attentif, on remarque très vite que les hommes sont absents, pas de l’histoire ni de la vie d’Evie, mais de cet endroit, au moment où commence le roman.
Le père d’Evie est décédé, son fiancé, marin pêcheur est, pour l’instant, disparu en mer dans une tempête qui arrive tout droit sur l’île. Sa mère qui brillait pourtant par son absence pendant l’enfance et l’adolescence d’Evie débarque au propre comme au figuré. Pour couronner le tout une baleine (on dit une, c’est comme ça, alors on dira que c’est une femelle) est venue mourir dans le bassin.
En attendant le retour de son fiancé, Evie se souvient de sa vie sur cette île avec son père. Elle raconte son enfance sans sa mère qui ne faisait que de brèves apparitions avant de repartir sur le continent. C’est comme si Evie et son père étaient reliés à cette île par des chaînes, qu’ils étaient condamnés à y rester et à y survivre. Au milieu des tempêtes, souvent sans domicile, le père et la fille ont vécu de la culture et du commerce d’une espèce particulière de Marijuana, la Winter Wonderland faisant de Winter Island une terre promise pour les consommateurs mais aussi une prison flottante pour ses habitants.
Au fil du texte on découvre une jeune femme forte qui a été la bouée de sauvetage de son père, celui qui sombrait à chaque départ de sa femme.
Dans un superbe décor sauvage, au milieu des embruns et du sel collé aux pages, on lit un magnifique texte qui montre la force que peuvent avoir certaines femmes et combien votre environnement et vos conditions de vie vous forgent le caractère. Tout ça sans sombrer dans un féminisme militant, on apprécie.
Donc, oui. C’est aussi beau dedans que dehors.
Un extrait :
J’ai envie de parler de mon père. Du fait que ma vie n’a pas pris la direction qu’elle aurait dû prendre, que je n’étais pas sûre de la façon dont elle allait tourner, que je suis liée à ce rocher au milieu de la mer, que je ne sais peut-être pas comment être amoureuse, ni ce qu’est l’amour. Que ma mère et mon père, les tempêtes, les montagnes, le continent, ma propre tendance à materner les autres peut-être que cela a tout gâché. J’ai envie de parler de Liam. De notre bonheur presque constant, de la peur que je ressens de le perdre un jour, lui aussi, car je ne sais pas comment ne pas perdre les choses. Ma mère continue de manger. Elle continue de se taire, et ce néant entre nous me fait tellement de peine, cette paix est si pesante, qu’il me faut la briser, car parfois je ne sais rien faire d’autre que briser. Pour trouver le Chaos.
4ème de couverture :
À la veille de ses noces, Evie fait face à trois problèmes : son fiancé marin-pêcheur est porté disparu en mer, la carcasse puante d’une baleine s’est échouée dans le petit port de Winter Island ; enfin sa mère épisodique a débarqué sans crier gare. Mais Evie en a vu d’autres. Elle a grandi trop vite auprès d’un père magnifique, aimant et négligent. Ensemble, ils ont vécu comme des hobos, des pirates, des explorateurs… et du commerce de la Winter Wonderland, la légendaire marijuana locale. Alors parfois il y avait des tempêtes, parfois des coups de soleil.
Et il y avait toujours juste assez pour ne jamais quitter cette ile magnétique, furieuse et solitaire, « comme germée du fond des eaux » au large des côtes californiennes. Au rythme changeant des marées, le récit se conjugue à tous les temps, à mesure qu’Evie évalue les dommages collatéraux de sa drôle d’enfance et les incertitudes inhérentes à sa vie insulaire.
L’auteure :
CRISSY VAN METER vit à Los Angeles. Elle enseigne l’écriture au Writing Institute du Sarah Lawrence College. Elle est la fondatrice de la plateforme Five Quarterly et responsable éditoriale de Nouvella Books. Créatures est son premier roman.
" En posant l'oreille sur l'océan, tu pourrais bien l'entendre vibrer en toi. " À la veille de ses noces, Evie fait face à trois problèmes : son fiancé marin-pêcheur est porté disparu en mer, la carcasse puante d'une baleine s'est échouée dans le petit port de Winter Island ; enfin sa mère épisodique a débarqué sans crier gare.
https://www.editions-lacroisee.fr
Editeur : La Croisée (janvier 2021)
ISBN : 978-2413038146