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9 septembre 2020

Les disparus du Joola d'Adrien Absolu

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L’histoire du naufrage du Joola est tragique comme celle du joueur de flûte de Hamelin qui conduisit les enfants à la rivière pour les y perdre, à laquelle elle me fait penser. Mais, à la différence de celle-ci, elle n’est pas une légende germanique. Elle est une histoire vraie. Qu’il me soit donné ici d’essayer de la raconter, du mieux possible, dix-huit ans après, sans trahir la mémoire des noyés.

Adrien Absolu a mené une minutieuse enquête sur le naufrage du Joola.

Qui s’en souvient ? Pas grand monde je suppose, moi-même j’avais dû en entendre parler pour l’oublier aussi vite.

L’auteur fait donc ici un état des lieux précédant le naufrage, relatant toutes les causes possibles et avérées en faisant une « chronique d’un naufrage annoncé ».

Il décrypte autant les problèmes mécaniques et physiques du ferry que l’environnement politique du Sénégal, peu propice, en tout cas à l’époque, pour des transports de personnes en toute sécurité.

Il va ensuite nous faire revivre au travers de témoignages de rares survivants cette nuit d’horreur où 1863 personnes ont perdu la vie, hommes, femmes, enfants, bébés. Les secours qui n’arrivent pas et quand ils arrivent leur manque de coordination et d’efficacité.

Ensuite vient le temps des deuils, celui des familles dont le corps d’un proche a été retrouvé et identifié, celui des familles qui attendent une liste des survivants pour y voir celui de la personne qu’ils attendent, celui des familles qui ne savent même pas si leur proche a pris le ferry ce jour-là. Enfin celui de ceux dont on n’aura rien à mettre dans la tombe, porté disparu, présumé décédé.

Commenceront alors les questions, les batailles, les procès.

Ce texte constitue un superbe document, un témoignage, et assez de preuves pour pouvoir analyser les causes pour ainsi éviter que ça ne se reproduise. Ce récit est étayé du témoignage involontaire d’un des disparus du Joola, jeune étudiant français de 20 ans qui envoyait régulièrement des mails pour donner des nouvelles à ses parents jusqu’à ce 26 septembre 2002.

Une question s’impose cependant à la fin de cette lecture. Pourquoi un paquebot britannique ayant coulé à cause d’un glaçon et ayant fait près de 400 morts de moins et dix fois plus de survivants est-il plus célèbre que ce taxi-ferry sénégalais ? J’ai quand même peur d’en connaître un élément de réponse.

A lire, pour ne pas les oublier.

Un extrait :

Le 26 septembre 2002 est un jeudi, il a le parfum doux de ces journées de fin de vacances, et du week-end approchant. L’hivernage touche à son terme. Le Sénégal continue de surfer sur la vague d’euphorie née de son parcours à la Coupe du Monde deux mois plus tôt, qui l’a vu atteindre les quarts de finale, mais avant toute chose battre la France lors du match d’ouverture. En provenance de Dakar, le Joola est arrivé la veille en début d’après-midi à Ziguinchor. Il s’est amarré perpendiculairement au lit du fleuve. Corseté par des aussières tendues à mort, il apparaît maintenant ficelé comme un gros rôti, légèrement de guingois sur bâbord, poussé par le courant de flot de la marée montante. Le chargement des véhicules a débuté dès le mercredi – un gros cube rempli de tomates et de thé de Gambie, un camion frigorifique, un 4 x 4 et quelques berlines réparties en deux files dans le garage au niveau 1 –, mais les opérations d’avitaillement en eau douce ont été contrariées par une chute en pression du réseau, et ce jeudi matin, le Joola s’apprête à repartir avec ses tanks remplis aux deux tiers seulement. Il n’a pas fait non plus le plein de carburant, mais il a assez normalement, avec ses 55 tonnes de mazout, pour rejoindre Dakar. La commercialisation de billets a cessé dès le mardi soir, la jauge de 536 passagers atteinte ; à son arrivée à Ziguinchor cependant, le commandant de bord aurait autorisé la reprise de la vente pour les tickets de troisième classe. Cela fait dix jours déjà que le passage par le bac de Farafenni, sur le fleuve Gambie, est suspendu en raison d’inondations, noyant les abords du fleuve sous un mètre et demi d’eau. Les prix prohibitifs pratiqués par la compagnie Air Sénégal, assurant la liaison aérienne entre Dakar et la Casamance, réservent l’usage de l’avion à un club très select. Et la Nationale 4 est toujours sous la menace des coupeurs de route ; on dit souvent d’eux « bandits de grands chemins », dont j’ai gardé la vision romantique des trois brigands d’Ungerer avec leurs hauts chapeaux, mais ceux-là sur les routes n’usent pas de tromblons à poivre pour arrêter les véhicules, plutôt de kalachnikovs.

 

L’auteur :

Adrien Absolu parcourt le continent africain depuis longtemps, racontant l’histoire de ses villes et de ses hommes. Il est l’auteur d’un récit Les forêts profondes (Lattès, 2016), sur l’épidémie d’Ebola en Guinée. Il a collaboré à la revue Le Tigre aux côtés de Francis Tabouret et Sylvain Prudhomme. Il travaille pour l’AFD et écrit aujourd’hui pour plusieurs revues et journaux notamment pour XXI et Le Point Afrique.

 

4ème de couverture :

Le 26 septembre 2002, un bateau, le Joola, part de Ziguinchor pour Dakar avec à son bord près de 2000 passagers. Il n’arrivera jamais à destination. 1863 personnes mourront. Adrien Absolu se rend à de nombreuses reprises en Casamance. L’histoire du Joola le hante. Comment une telle catastrophe a-t-elle pu arriver ? Les responsables essaient-ils de ralentir l’enquête ? Qui étaient les victimes et notamment Dominique, un Français de vingt ans ?

Adrien Absolu nous raconte, heure par heure, cette journée de septembre 2002. Il remonte le temps, lorsque le bateau a été construit et qu’on l’a laissé naviguer malgré ses vices. Il décrit le courage et l’obstination de ceux qui ont tout tenté.

 

 

Les disparus du Joola

Le 26 septembre 2002, un bateau, le Joola, part de Ziguinchor pour Dakar avec à son bord près de 2000 passagers. Il n'arrivera jamais à destination. 1863 personnes mourront. Adrien Absolu se rend à de nombreuses reprises en Casamance. L'histoire du Joola le hante. Comment une telle catastrophe a-t-elle pu arriver ?

https://www.editions-jclattes.fr



Editeur : JC Lattès (Aout 2020)

Collection : littérature française

ISBN : 9782709661553

 

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