Only lovers left alive - Dave Wallis - Sonatine
Voici un vrai bijou que les éditions Sonatine ont eu la merveilleuse idée de faire traduire et publier soixante ans après sa publication et son interdiction en Irlande à l'époque.
Un peu trop libéré, un peu beaucoup subversif, ce texte était résolument en avance sur son temps même si en 1964, l'émancipation de la jeunesse était bien enclenchée.
Dans ce roman justement, les enfants et les adolescents se trouvent libérés de toutes les contraintes imposées par leurs parents, leurs professeurs, la police et même la royauté puisque tous les adultes se suicident sans aucune raison apparente hormis "la perte de l'espoir, ils n'en ont plus rien à faire". Les adultes souffrent du syndrome du métro-boulot-dodo, la crise les rend esclaves de leurs boulots, le poids des choix politiques pèsent sur leurs épaules. Il n'y a plus de médias, les journalistes étant tous morts.
Seuls restent donc les enfants et les ados qui vont bientôt faire régner la terreur et, finalement, recréer une sorte de société régie par la loi du plus fort mais aussi et peut-être surtout par la disparité garçons-filles. Tous les travers de nos sociétés sont là mais revenu à l'état sauvage, à l'image des meutes de chiens qui sillonnent les rues de Londres, ou à l'image de ces "bandes" de gamins menteurs, voleurs, violeurs, tueurs.
C'est un texte parfois violent, parfois plus sensible mais toujours dérangeant, oppressant.
On pensera bien sûr à Sa majesté des mouches de William Golding publié 10 ans avant Only lovers left alive et on peut se douter que Dave Wallis s'en est peut-être largement inspiré... Dans le roman de Golding aussi, les enfants et les adolescents se retrouvent livrés à eux-mêmes, privés de l'influence des adultes et isolés sur une île comme le sont les gamins de Wallis dans Londres puis dans sa campagne environnante. Mais on lui laissera le bénéfice du doute car ce texte n'en reste pas moins excellent et écrit avec talent. Sans lourdeurs inutiles, rythmé, on a bien du mal à le lâcher une fois commencé.
Un très bon roman donc avec une histoire qui n'a pas pris une ride et à lire avec les éditions Sonatine.
Une traduction de Samuel Sfez.
Résumé éditeur :
Angleterre, années 60. Sans doute désespérés par l'état du monde, les adultes sont touchés par une vague de dépressions. Les suicides se multiplient. Peu à peu livrés à eux-mêmes, les adolescents sont maintenant libres de faire ce qui leur plaît. Kathy, Ernie et leur bande essaient de survivre dans ce monde de plus en plus désolé où la violence s'est installée...